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mouvement des femmes Iraniennes

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Tuesday, November 10, 2009

Les religions n’aiment pas les droits des femmes

TRIBUNE LIBRE - Article paru - le 14 mars 2009
L’HUMANITÉ DES DÉBATS
Les religions n’aiment pas les droits des femmes
PAR GENEVIÈVE FRAISSE , PHILOSOPHE (*).
Comment le Vatican peut-il condamner l’IVG d’une fillette violée ?
Le Vatican a du mal avec l’Holocauste : du mal parce qu’il n’a pas brillé, au XXe siècle, pour le dénoncer ; du
mal parce qu’il est capable de soupeser avec légèreté, au XXIe siècle, le négationnisme d’un de ses prélats. Or
depuis longtemps, nous le savons, les militants anti-avortement dénoncent l’IVG comme un acte similaire à
l’Holocauste. Nous sommes des « survivants », clament les pro-vie, car nous avons survécu à la contraception et
à l’avortement, meurtres de masse. Le Vatican, en 2009, aggrave encore les choses : la négation de
l’Holocauste y semble mieux admise que l’avortement d’une gamine. Oui, face à l’histoire brésilienne
d’excommunications en série pour l’avortement de cette fillette, violée, enceinte de jumeaux à neuf ans, la
question principale vise l’Église, dans sa splendeur vaticane, et par voie de conséquence ceux qu’elle entraîne
avec elle, les catholiques… On les dit malheureux, furieux contre leur hiérarchie… Répétons-le : le lien entre
les deux affaires n’est pas anecdotique, ou simple coïncidence : l’extermination des juifs serait moins grave
que la destruction de cellules vivantes sans visage.
Ensuite, en ce XXIe siècle où les religions sont à l’honneur, réfléchissons à ce qu’elles font aux femmes. Ma
question est simple : quelle religion pense sérieusement le droit des femmes ? Il y a celles qui refusent
l’avortement, l’habeas corpus des femmes, maîtrise de la reproduction, et il y a celles, parfois les mêmes, qui
refusent la prêtrise aux femmes, c’est-à-dire la parité, dont je rappelle la signification : le partage du pouvoir
de décider et d’agir pour le bien commun. Du côté de la liberté individuelle, de la propriété du corps, et du
côté du collectif (comment imaginer et gouverner le monde), les religions préfèrent penser «pour» les femmes
plutôt que de les laisser penser «par» elles-mêmes…
Allons-y sans détour : aucune religion ne pense l’égalité des sexes, aucun des trois monothéismes
notamment. Chrétiens, juifs, musulmans louvoient tous à leur façon pour éviter cette question brutale :
l’égalité, doublée de la liberté, pour tous et toutes. On me répond toujours que tout est dans la nécessaire et
délicieuse « complémentarité » des sexes ; manière de formuler, avec bonne conscience, toutes sortes de
disparités.
Venons-en, enfin, à l’actualité politique : je n’écris pas ces lignes pour pester contre les religions en général, et
leur traitement des femmes en particulier. J’écris pour expliquer que lorsque les féministes s’insurgent contre
telle ou telle obligation liée à la religion musulmane, port du foulard ou polygamie, elles savent que la religion
chrétienne, aujourd’hui l’Église catholique, peut être tout autant discriminante. Elles connaissent évidemment
le soupçon, non négligeable, de bien-pensance colonialiste. Mais elles se savent dans le même bateau,
embarcation si fragile du droit des femmes… Voyez d’ailleurs le peu de considération, pour ne pas dire le
mépris, accordée par notre gouvernement au Planning familial.
Elles se mettent donc dans le même bateau car l’histoire leur enseigne la vigilance. Le droit des femmes ne s
’exporte pas ? Mais il ne se fractionne pas non plus. Et partout, dans le monde, on peut s’en emparer. Ce n’est
pas l’Occident et son universalisme qui nous intéressent, ce sont les principes d’égalité et de liberté.
(*) Derniers livres parus en 2008 : Le privilège de Simone de Beauvoir, Actes Sud et L’Europe des idées, France
Culture/L’Harmattan.

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