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mouvement des femmes Iraniennes

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Monday, February 29, 2016

Commission de lutte contre les extremisme religieux 3éme pékin

Commission de lutte Contre les extrémismes religieux 2eme 1995 Pékin

Commission Pekin1995 1e Partie

TRIBUNE Au nom de Kamel Daoud — 28 février 2016

·        
 Il existe, en France, une élite de
gauche qui entend fixer les critères de la bonne analyse et qui veut faire de
nous les otages d’un contexte français traumatisé par la peur de l’accusation
d’islamophobie. Une peur qui pétrifie nombre d’élus, d’écrivains, de
journalistes et de féministes, quand elle ne les amène pas à défendre les
niqabs et les prières de rues, à excuser les violences dans les cités et les
propos de gamins qui clament, avec fierté, «Je ne suis pas Charlie». La même
élite qui s’essaie à l’exégèse coranique et cherche la bénédiction de religieux
devenus ses principaux interlocuteurs, aux dépens des musulmans laïques
réfractaires au rôle de victime.

 


·        
La romancière
franco-tunisienne Fawzia Zouari prend la défense de l’écrivain algérien
Kamel Daoud, et appelle de ses vœux un nouveau discours
à gauche affranchi de la peur de l’accusation d’islamophobie.
Un discours qui conçoit le fait que les musulmans, comme les
chrétiens, puissent aimer ou ne pas aimer leur monde, adhérer ou non
à leur religion.
·        
 
 Au nom de Kamel Daoud
Kamel
Daoud a décidé d’abandonner le journalisme suite à une tribune signée par un
collectif d’intellectuels dans
 le Monde lui reprochant son «culturalisme», ses «clichés
orientalistes», 
son«essentialisme», pour ne pas dire son islamophobie ; soit, à quelque
détail près, les mêmes accusations qui lui ont valu d’être menacé de mort par
les barbus de son pays. Voilà comment on se fait les alliés des islamistes sous
couvert de philosopher… Voilà comment on réduit au silence l’une des voix dont
le monde musulman a le plus besoin.
Et
quel est le motif de ce tir groupé qui a ciblé l’écrivain et journaliste
algérien ? Kamel Daoud a eu le tort de pointer sans détours les travers des
siens. Plus précisément, il a expliqué que les harcèlements sexuels perpétrés à
Cologne par des personnes d’origine arabo-musulmane découlent d’une tradition
qui n’a eu de cesse de contrôler la sexualité et de condamner à la frustration
ses jeunes. Branle-bas dans les rangs des bien-pensants et avocats d’office des
musulmans ! Et pourtant, qui douterait des affirmations de Daoud ? Qui, des
signataires du
 Monde,pourrait démentir que la plupart des sociétés arabes
vivent dans un puritanisme outrancier et une grande misère sexuelle ? Les
femmes y sont obligées d’arriver vierges au mariage, et les garçons
célibataires sont rendus fous par la frustration. La loi religieuse, appuyée
souvent par la loi civile, ne permet pas à un homme ni à une femme d’avoir une
relation physique avant le mariage. Encore faut-il que celui-ci soit possible
en ces temps de crise et de chômage… Ce sont là des réalités concrètes, et non
des idées. Et ce n’est pas mentir ni insulter que de dire, oui, le musulman
réfléchit souvent de la même façon et agit avec le même réflexe. Oui, le
concept de
 oumma recouvre l’adhésion à des certitudes dogmatiques
aujourd’hui plus que jamais attestées sous le voile et le qamis. Oui, il y a
une psychologie de la foule arabe. Oui, les femmes sont perçues chez nous comme
des corps à cacher. Oui, il y a, dans nos sociétés, un rapport pathologique à
la sexualité induit par la morale religieuse. Oui, il y a une forme de racisme
qui considère qu’on peut violer une juive ou une chrétienne parce qu’elle vaut
moins qu’une musulmane. Oui, les intégristes sont dans la culture de la mort.
Oui, les réfugiés en Europe doivent recevoir une éducation à l’égalité des
sexes. Oui, il faut leur mettre un traité de laïcité dans la main. Leur
enseigner le respect des femmes des autres religions. Des femmes tout court.
Alors faut-il se taire pour plaire aux
orientalistes qui s’ignorent ? Se contenter de donner du monde arabe une image
lisse et de l’islam, l’unique écho de ses siècles d’or ? Les signataires de la
tribune appellent à un «débat apaisé et approfondi». Cela veut dire quoi, au
juste ? Qu’on occulte ce qui ne va pas dans nos sociétés ? Qu’on hésite à
décrire des réalités amères sous prétexte de devoir faire dans la nuance ?
Qu’on se sente coupable d’aimer dans l’Occident l’espace de liberté et
d’émancipation qui nous font défaut ? Bien sûr que nous n’ignorons pas que
l’Europe possède ses propres excès, ses violences contre les femmes, ses fêtes
alcoolisées qui génèrent harcèlements et viols. Et alors ? Cela absout-il les
musulmans que nous sommes de nos propres dérives ?
Il existe, en France, une élite de
gauche qui entend fixer les critères de la bonne analyse et qui veut faire de
nous les otages d’un contexte français traumatisé par la peur de l’accusation
d’islamophobie. Une peur qui pétrifie nombre d’élus, d’écrivains, de
journalistes et de féministes, quand elle ne les amène pas à défendre les
niqabs et les prières de rues, à excuser les violences dans les cités et les
propos de gamins qui clament, avec fierté, «Je ne suis pas Charlie». La même
élite qui s’essaie à l’exégèse coranique et cherche la bénédiction de religieux
devenus ses principaux interlocuteurs, aux dépens des musulmans laïques
réfractaires au rôle de victime.
Cette tendance à dicter aux
intellectuels arabes ce qu’ils doivent dire ou ne pas dire sur leurs sociétés
confine au néocolonialisme. Elle relève d’un tropisme qui rend incapable de
nous voir autrement que comme des «protégés». Elle refuse l’idée qu’il puisse exister
des Arabes souverains dans leur tête, des musulmans qui contestent leurs
traditions, désobéissent aux consignes de bien-pensance, fissurent les
échafaudages spéculatifs autour d’un Orient fantasmé.
Or c’est d’un nouveau discours que nous
avons besoin de la part de la gauche. Un discours qui ne soit pas opportuniste
ni de façade. Qui conçoit le fait que les musulmans puissent aimer ou ne pas
aimer leur monde, adhérer ou non à leur religion. Qui sache qu’il n’y a pas que
Kamel Daoud qui soit habité par le désir de changer nos sociétés. Oui. Nous
sommes de plus en plus nombreux dans le monde arabo-musulman et ailleurs à
penser que le salut de l’islam comprend et exige la relecture de l’islam. Nous
refusons la version d’une foi paisible et de peuples innocents, aussi erronée
que son équivalent d’une foi haineuse et obscurantiste. Nous n’obtempérons pas
aux affirmations selon lesquelles le jihadisme n’a rien à voir avec le référent
doctrinal. Nous refusons le refus de l’amalgame. Nous ne nous sentons pas obligés
de servir au lecteur occidental nos poésies érotiques de jadis et nos supposées
libertés sous le voile. Nous laissons à d’autres, sans les dénigrer ni leur
manquer de respect, le soin de chanter les couplets d’une tradition réconciliée
avec le sexe, la fameuse liste des synonymes de l’amour ou le millier de contes
de Shéhérazade, qui ne viendront pas au secours du jeune Saoudien ou Marocain
menacé de prison ou de guillotine pour liaison extraconjugale. Chacun son rôle.
Et si certains veulent se constituer en brigade anti-islamophobe, assimilant
toute critique de l’islam à un sentiment de peur ou de haine, nous estimons que
notre rôle à nous est d’éveiller les consciences sur le poids de nos tabous
spécifiques et les maux de nos sociétés en attente de liberté.
Alors qu’on cesse de critiquer d’un côté
le silence des intellectuels musulmans sur les violences perpétrées par
certains de leurs coreligionnaires, et d’appeler ces intellectuels à se taire
dès lors qu’ils dérogent à la pensée correcte sur l’islam. Serions-nous
assignés à une parole positive et aseptisée sur notre monde ? N’est-ce pas là
une insidieuse façon de nous maintenir dans la mission subalterne d’allumer le
feu du temple occidental et de flatter sa prétention à être la mesure de toute
réflexion ? Dénoncer nos torts ferait-il de nous des «essentialistes» et des
«culturalistes» ? Mais enfin, qui est essentialiste, si ce n’est celui qui fait
précéder nos réalités par l’idée qu’il s’en fait et la détermine selon ses
grilles de lecture ? Qui sont les orientalistes, si ce ne sont ces détracteurs
de Kamel Daoud, qui, souvent, n’ont connu le monde musulman qu’à travers les
livres ou pour le soumettre à leurs hypothèses de travail, quand ce n’est
à l’absolutisme de principes dans lequel ils s’enferment ?
Daignez donc, Messieurs Dames,
reconnaître que les Kamel Daoud peuvent remettre en question votre savoir
universitaire. Daignez avouer votre désarroi devant une nouvelle catégorie
d’intellectuels arabes qui sort du paradigme de la défense radicale de l’islam
tout autant que de son rejet excessif, et qui s’estime capable de penser par
elle-même. Sachez que des Kamel Daoud, il en naît tous les jours de l’autre
côté de la Méditerranée. Et c’est là un signe de bonne santé. Ces journalistes,
écrivains et artistes, menacés dans leur vie pendant que l’on sirote
tranquillement son café à Paris, qui ont le courage de forcer leur monde à la
critique et au changement, qui aspirent à la liberté de dire, tout simplement,
veulent devenir les sujets de leur propre histoire au lieu de rester objet des
études occidentales. En cela, et contrairement à ce que vous pensez, ils ne
sortent pas de leur monde ni ne souffrent de déni d’identité. Bien au
contraire. Ils s’inscrivent dans une autre tradition de l’islam, celle des poètes
rebelles et des penseurs du doute qui ont maintenu et maintiennent toujours
allumée la flamme d’une civilisation musulmane en attente de la révolution qui
la sauvera d’elle-même et des autres : la révolution religieuse et sa
conséquence naturelle, la révolution sexuelle.


Par fawzia Zouari Ecrivaine franco-tunisienne

Thursday, February 25, 2016

«هملت» در تئاتر فجر چگونه سانسور شد

«هملت» در تئاتر فجر چگونه سانسور شد

Bernice Dubois

Féminisme face aux intégrismes et au pouvoirs politico-religieux




Fondée par la C.L.E.F. (Coordination française pur le Lobby Européen des Femmes) en 1993, la Commission de lutte contre les extrémismes religieux a commencé par préparer un atelier pour la Conférence de Pékin en 1995. Après avoir demandé la participation de toutes les associations de la C.L.E.F. et reçu des réponses, nous avons commencé ce travail.
Notre atelier a Pékin a eu plus de 60 participants, surtout des femmes mais aussi des hommes. Ce fut très réussi car très interactif. Entre autres intervenantes, Jamileh Nedai, une des fondatrices de la Commission, y a dressé une liste analytique de la jurisprudence iranienne concernant les femmes. À Pékin, nous avons aussi organisé une réunion d’information le 12 septembre, puis une conférence de presse le 14 à laquelle sont venus, entre autres journalistes, ceux du Chicago Tribune, de l’AFP à Hong Kong, d’un journal catholique francophone et de la presse espagnole.
De retour à Paris, nous avons voulu nous pencher sur les manuels scolaires d’écoles religieuses privées. En fait nous n’avons pas trouvé d’enseignement sexiste dans les quelques écoles catholiques et juives dont nous avons pu avoir les manuels. Les manuels des écoles musulmanes étaient en arabe et nous n’avons donc pas pu les examiner. Nous avons été obligées d’abandonner cette piste.
Ensuite nous avons entrepris une étude des textes fondateurs des religions représentées au sein de la Commission (Bouddhisme, Catholicisme, Islam, Judaïsme, Protestantisme) pour y étudier les inégalités imposées aux femmes dans les domaines de la prière, du mariage, du divorce, de l’adultère. Des différences ont été évidentes, pas toujours celles auxquelles nous pouvions nous attendre d’ailleurs. Mais malgré quelques bonnes surprises, il nous est apparu clairement que l’unique garantie pour les femmes était bien une société réglée par la laïcité, les mettant à l’abri dans les domaines de l’éducation, de la vie civile (mariage, divorce, garde d’enfants, etc.),  de la vie professionnelle et de la vie sexuelle.
Comme base de construction et de sauvegarde d’une société laïque et égalitaire pour tous, l’éducation était clairement le fondement principal. Nous avons donc organisé un Colloque à l’UNESCO les 23 et 24 mars 1999 sur le thème : « Education : Religions, Intégrismes ».  La soirée d’ouverture réunissait des conférenciers issus du Catholicisme, de l’Islam, du Judaïsme, du Protestantisme ainsi que du Ministère de l’Education Nationale et d’organisations féministes, dont Wassyla Tamzali, alors Directrice du Programme de l’UNESCO pour la promotion du statut des femmes de la Méditerranée. Cette soirée a accueilli plus de 200 personnes dont plusieurs journalistes. Les participants venaient de beaucoup de pays autour de la Méditerranée et de quelques autres pays européens. Le lendemain, nous y avons animé une Journée séminaire d’une trentaine de personnes d’une dizaine de pays, presque toutes des enseignantes, éducatrices, personnes de l’Education Nationale et quelques représentantes d’associations de femmes.
Les conclusions ont été diffusées dans tous les pays représentés, au niveau des ministères concernés, d’associations féministes, d’institutions religieuses. Par la suite nous avons organisé d’autres soirées-débats avec, toujours, la rédaction d’un fascicule résumant notre travail préparatoire pour le sujet.
De 2000 à 2006, nous avons représenté la C.L.E.F. à l’ONU et y avons présenté chaque année des déclarations verbales et écrites, à la fois à la Commission du Statut des Femmes à New York et à la Commission (devenue Conseil en 2005) des Droits Humains à Genève, toujours sur le thème des extrémismes religieux par rapport aux droits des femmes.
Nous avons fait du lobbying auprès de représentants de l’ONU comme Mary Robinson, Haute Commissaire des Droits Humains, Abdelfattah Amor, Rapporteur spécial sur l’intolérance religieuse, auprès de Ministres français de l’Education Nationale et des Droits des Femmes, auprès de membres de leurs cabinets, et auprès de délégués gouvernementaux de divers pays à l’ONU.
Au nom de la C.L.E.F., nous avons été auditionnées par les deux commissions Stasi (la laïcité et les discriminations).
Pour Pékin + 5, à Genève, nous avons organisé et animé un atelier sur les méfaits des extrémismes religieux pour les femmes.
Pour Pékin + 10, nous avons animé le groupe de travail à Genève sur Femmes et fondamentalismes et, avec des femmes de pays très divers, avons élaboré une déclaration consensuelle et 4 recommandations à l’intention des Etats. Le mot « laïcité » n’a posé aucun problème. Nos recommandations :
« Les gouvernements doivent assurer que les lois sur les droits civiques sont mises en œuvre et appliquées.
Le principe de la laïcité doit être respecté par chaque État dans toutes ses politiques. Les gouvernements doivent refuser toute intervention des fondamentalistes dans l’éducation. La laïcité respecte de façon égale la non croyance et les croyances.
Nous rejetons l’utilisation de traditions et d’ethnicité pour empêcher les femmes de jouir de tous leurs droits reproductifs et sexuels.
Nous rejetons l’augmentation de dépenses militaires au nom de la sécurité au détriment de programmes, essentiels pour les femmes, pour la santé, l’éducation et le social. »

      Il est notoire qu’en mars 2003, la Commission du Statut des Femmes de l’ONU à New York a suspendu sa séance sur les violences faites aux femmes, en rejetant un paragraphe relatif au recours à la coutume, tradition ou religion pour justifier des violences. Ce paragraphe est pourtant inclus dans la Plateforme d’Action de Pékin de 1995, Article 124, et ces prétextes légitiment effectivement toutes sortes de violences à l’encontre des femmes, en particulier, les mariages forcés et/ou précoces, l’enfermement, les crimes dits « d’honneur », les mutilations génitales féminines, les lapidations, et j’en passe. Des Etats catholiques, musulmans, protestants ont préféré abandonner les femmes aux violences plutôt que d’admettre que les religions ou les coutumes servaient de justification. Ce fut un lamentable recul par rapport à la Plateforme d’Action.
Toujours à l’ONU, toujours en mars 2003 mais à Genève, le rapporteur Spécial de l'ONU sur le racisme, Doudou Diène, dans son rapport présenté à la 4ème session de la CDH sous la cote A/HRC/4/19 a affirmé qu’il était raciste d'interdire la Burka. Des associations importantes belges ont déclaré au même moment qu'une interdiction devait être « proportionnée »., « Il ne faut pas interdire ce qui est marginal, comme par exemple "la lapidation" ont-elles dit*. Commentaire de Malka Marcovich : 
 « En suivant cette logique, nous aurions dû attendre un nombre important d'incestes, de viols, de meurtres pour que ces crimes soient interdits ».
Nous avons condamné la politique d’immigration en France, responsable d’abus en permettant l’application des codes de la famille ou statuts personnels de pays
* Le MRAX et le Centre pour l’égalité des chances.
d’origine à des femmes immigrées (Algérie, Maroc, Turquie) à la demande du conjoint seul. Ces codes placent la femme en minorité juridique et autorisent la polygamie et la répudiation.
La polygamie est tolérée de fait, car les pères touchent les allocations familiales pour les enfants nés d’unions non reconnues avec des femmes maintenues en situation irrégulière. En cas de divorce, les femmes étrangères non régularisées par leur mari sont expulsables ; le mari seul garde le droit de séjour.
En fait, la France, comme d’autres démocraties dans le monde, ne soutient nullement ses propres lois et ses propres principes, pourtant élaborés au cours des générations pour réaliser une société plus égalitaire.
La France abandonne en particulier la laïcité qui fait désormais l’objet d’un véritable bras de fer dans lequel les femmes ont énormément à perdre. Elleconstitue l’un des piliers pour l’égalité réelle entre les individus des deux sexes ; elle est la reconnaissance de l’Autre ; elle est le bien de tous. La laïcité  signifie  le respect de toute croyance ou non croyance.

Pour nous il n’y a pas de laïcité  « ouverte », « positive », ou « tolérante ». C’est une valeur universelle : elle ne « tolère » pas les différences ; elle les reconnaît et les valorise. Nous y sommes profondément attachées ; nous devons la  défendre. Il y va de notre liberté.

La conférence de l’Initiative Féministe Européenne du 31 mai au 1° juin 2008 à Rome, groupant des femmes de 20 pays d’Europe et du Moyen Orient, a exprimé avec éclat le refus  d’enfermer les femmes sous leurs voiles ou derrière les murs de leurs maisons, le refus de pourchasser et de criminaliser celles qui ne demandent que la libre disposition de leur propre  corps, le refus qu’au nom du « respect de la diversité culturelle »,  soit  portée la moindre atteinte à leurs droits fondamentaux.

Nous mesurons bien le recul déjà fortement entamé et promu par des gens de gauche comme de droite. La mixité, dans nos écoles, piscines, hôpitaux et autres lieux publics, n’est déjà plus garantie. Des filles sont parfois manipulées, parfois à juste titre effrayées, car menacées de violences, et ces menaces ne sont pas vaines. Sont affectées beaucoup de disciplines scolaires, la vie sociale entre élèves, des contacts et sorties mixtes, des examens ou thèses jugés par des professeures femmes, et bien d’autres.
      À la C.L.E.F. des femmes d’origine maghrébine et iranienne nous ont fait part de leur découragement et de leurs craintes que le statut d’égalité, la liberté, ces droits pour lesquels beaucoup d’entre elles, ou leurs mères, étaient venues en France, ne soient remis en cause. Beaucoup d'adolescentes témoignent porter le voile comme seul moyen d'échapper au harcèlement des garçons dans les cités. Et nous savons qu’à l’étranger, des dizaines de milliers de femmes ont été assassinées ou mutilées pour leur refus courageux de ces vêtements.
Celles qui acceptent de se voiler apprennent trop souvent que cette soumission entraîne d’autres encore, et elles deviennent en fait les victimes d’un véritable Apartheid de sexe. Celles qui refusent de se voiler sont traitées de putains et sont victimes de violences, de viols, d’assassinats (auxquels n’échappent pas non plus les « voilées »). Celles d’autres religions craignent une contagion et la perte des droits durement acquis par de longues années de lutte.
Faut-il attendre l’augmentation des violences physiques pour décider qu’il y a injustice ou oppression ?
La neutralité laïque est aussi préventive. Elle peut empêcher des conflits entre différentes religions ou positions politiques, entre croyants et athées. C’est l’ouverture et l’espace neutre de dialogue que nous devons rechercher et non l’affichage des différences qui enferment. Pour citer Henri Pena-Ruiz « La laïcité n'est pas la destruction des croyances, mais la distinction entre ce qui relève de la croyance et ce qui est du domaine de la connaissance ».
Ni le monde politique ni le monde religieux ne veut réellement les droits égaux des femmes. Dans des démocraties, nous réussissons parfois au prix d’une énergie et d’une persévérance démesurées (et pourtant sans recourir aux violences et aux destructions gratuites que nous voyons si souvent dans d’autres manifestations en France). Mais nos progrès ne sont jamais des « acquis », ce mot  que des éléments mâles de notre société ont toujours à la bouche. Nous savons pertinemment que nos victoires ne seront pas définitives, car nous vivons dans un monde où trop de mâles n’abandonnent pas, ne serait-ce qu’une parcelle de leur pouvoir.

Cela dit, je dois préciser que dans la deuxième moitié des années 1990, nous étions non seulement très écoutées en tant que féministes, mais aussi suivies de manière efficace par deux représentantes de la France à l’ONU à New York. D’abord Hélène Gisserot, puis Claire Aubin (qu’elle avait formée) étaient exceptionnellement attentives à nos préoccupations et en tenaient réellement compte. Cela n’a jamais été pareil depuis et il n’est que justice de rendre ce tout petit hommage aux deux.

Pour le monde des médias, nous sommes toujours aussi invisibles ; ils préfèrent les femmes soumises, parfois quelques victimes médiatisées, à plaindre passagèrement, soit encore des femmes qui adoptent les positions des hommes. (M. Aubry) Nous avons connaissance de bon nombre d’articles, de lettres, envoyés par des femmes reconnues comme expertes nationales ou internationales, et qui restent sans même un accusé de réception par la presse, certaines expertes refusées pour des débats à la télévision, tant de femmes journalistes professionnelles jamais promues à des postes décisionnels dans leur métier, (et l’on s’étonne que les femmes lisent beaucoup moins la presse que les hommes, mais beaucoup plus de livres).

Nous pensons néanmoins être mieux écoutées qu’autrefois par nombre d’élus et par des pouvoirs publics, mais sans que cela soit suivi d’une mise en œuvre de nos desiderata.

Pour les femmes qui veulent agir pour une égalité effective et réelle, il y a plusieurs chemins, tous ardus. On peut se lancer dans la lutte sauvage à l’intérieur des divers partis politiques. On peut aussi se lancer dans la lutte tout aussi sauvage à l’intérieur des diverses religions pour arracher un statut d’égalité. On peut encore combattre dans des associations féministes, diffuser les informations, organiser des formations et faire du lobbying auprès des élus français et européens comme auprès des représentants de nos pays dans les instances de l’ONU. Toutefois moins nous aurons d’illusions sur ce que ces divers « pouvoirs » seront prêts à faire pour nous, mieux nous pourrons réussir, car il ne s’agit surtout pas de croire aux bonnes paroles que certains proféreront, ni de relâcher jamais nos pressions.
Bon courage à toutes.

Bernice Dubois
le 18 novembre 2010 

5 Mars 2016 PARIS

هشت مارس روز جهانی مبارزات زنان

شنبه پنجم مارس 6102 پاریس

ساعت پنج بعداز ظهر

75 boulevard Vincent Auriol 75013 Paris métro chevaleret

نازلی سخن بگو نمایش. بازیگر و کارگردان : پروانه سلطانی

سخنرانی و بحث و گفتگو

مذهب و زن ستیزی

یاد رفتگان ، هما ناطق

کمیته زنان ضد سنگسار . پاریس

Thursday, February 11, 2016

comite des femmes contre la lapidation vous invite 05/03/2016

هشت مارس روز جهانی مبارزات زنان

شنبه پنجم مارس  پاریس

ساعت پنج بعداز ظهر

75 boulevard Vincent Auriol 75013 Paris métro chevaleret

نازلی سخن بگو نمایش. بازیگر و کارگردان : پروانه سلطانی

سخنرانی و بحث و گفتگو

مذهب و زن ستیزی

یاد رفتگان ، هما ناطق

کمیته زنان ضد سنگسار . پاریس

Saturday, February 06, 2016

A lire

Au nouveau chic radical : « Laïcité, dégage ! » (par Jeanne Favret-Saada)

En se penchant sur l’ouvrage récemment traduit en français La Critique est-elle laïque ? Jeanne Favret-Saada revient sur le cas de l’affaire danoise des caricatures, qu’elle a elle-même étudiée dès 2007. Elle montre, entre autres, que La Critique est-elle laïque ? prend son départ dans une version tronquée de la crise des dessins de Mahomet en vue de justifier une critique cinglante de la laïcité, y compris sous la forme anglo-américaine du secularism . Malgré ses oripeaux scientifiques, le livre ne recule pas devant les approximations, les méthodes douteuses et les contresens. Mais c’est qu’il s’agit de soutenir une cause « progressiste » : secularism et laïcité figureraient parmi les instruments que l’Occident libéral s’est forgés afin de soumettre les peuples de la planète à son hégémonie.
Ce petit livre, paru en 2009 aux USA sous le titre Is Critique Secular ? Blasphemy, Injury and Free Speech, rapportait les conclusions d’un séminaire tenu deux ans auparavant à Berkeley sur le caractère laïque ou non de la « théorie critique ». Il avait appuyé sa réflexion sur le cas de l’affaire danoise des dessins de Mahomet en 2005-2006, que j’avais moi-même étudiée dans Comment produire une crise mondiale avec douze petits dessins. Or dans le livre de ces chercheurs américains, les références aux événements survenus pendant l’affaire (entre 30 septembre 2005 et printemps 2006) étaient rarissimes et grossièrement partiales, malgré la présence de deux anthropologues, Talal Asad et Saba Mahmood, en principe voués à l’empirie.
Du coup, j’avais étudié l’armature intellectuelle du volume : qu’était-ce donc que cette « théorie critique », dont les auteurs découvraient qu’en aucun cas, elle ne saurait être secular, bien qu’elle prétendît venir en droite ligne de la Kritik kantienne (donc de la pensée des Lumières), de Marx, puis de Foucault ? Bien sûr, j’avais lu quelques livres de Butler, mais j’ignorais son œuvre récente ainsi que celle de Wendy Brown. Après avoir quelque peu besogné dans ces chapitres et consulté les autres publications des deux anthropologues – car j’avais conservé le souvenir d’une monographie lumineuse de Talal Asad, en 1970, sur les Kababish du Nord-Soudan -, j’avais jugé inutile de pousser plus avant : pour finir, Is Critique Secular ? était une petite production, d’une petite secte. Du radicalisme de campus, anti-impérialiste, anti-libéral, et anti-laïque, une production groupusculaire qui n’espère pas donner à penser mais catéchiser ses fidèles. Le livre, en somme, s’adressait à ces croyants potentiels que sont les étudiants, leur proposant la conversion de travaux universitaires en un credo politico-théorique.
Or ce manifeste vient d’être traduit en français, avec une préface de Matthieu Potte-Bonneville qui nous prévient qu’il s’agit là d’une œuvre importante, issue de la grande pensée de Foucault. De divers côtés, on m’a demandé ce que j’en pensais, car il se disait que ce texte était appelé à compter dans le débat intellectuel français. Stupéfiée, j’ai interrogé des collègues américains sur la réception, en 2009, de Is Critique Secular ? sur les campus (énorme), et sur le poids des deux anthropologues, Asad et Mahmood, dans la discipline (énorme). Relisons donc ce livre, en français et en 2015, puisqu’il sort un an après les massacres de janvier à Paris à Copenhague et deux mois après ceux de novembre à Paris, qui ont jeté rétrospectivement une lumière crue sur l’affaire danoise.

Monter une affaire est un travail de longue haleine

Dans mon propre livre sur les événements danois de 2005-2006, j’ai consacré les trois premiers chapitres à leurs préalables : le passé du Danemark en matière de racisme et d’immigration, le changement de majorité parlementaire à partir de 2001, et l’hésitante politique d’immigration du nouveau gouvernement.
L’affaire des dessins de Mahomet est, au départ, une modeste controverse médiatique qui oppose le journal danois le plus important, le Jyllands-Posten, à cinq imams résidant au Danemark. Deux d’entre eux, qui ambitionnent d’y être reconnus comme les porte-paroles de l’islam et qui sont en conflit avec la presse depuis longtemps, protestent contre la publication, le 30 septembre 2005, de douze dessins représentant le Prophète. Ceux-ci figurent à titre de vignettes illustratives dans une grande enquête sur l’autocensure des artistes par crainte de l’activisme salafiste. Intitulée « Les Visages de Mahomet », elle vise explicitement ces imams « qui portent l’image publique de l’islam » et qui, au contraire de leurs paisibles coreligionnaires, affichent le « sentiment gigantesque, démesuré, de leur propre importance » ainsi qu’une « sensibilité exacerbée devant toute manifestation de désaccord », devant toute « critique de leur conduite personnelle » dont ils font « une insulte au Livre sacré ». Ces deux imams et trois de leurs collègues, rassemblés dans un « Comité Européen de défense du Prophète », vont lancer une double protestation contre ces dessins : parce que le Jyllands-Posten a enfreint l’interdiction de représenter le Prophète, et parce que ces dessins seraient des caricatures (ce n’est en réalité le cas que pour quatre d’entre eux).
D’emblée, le Comité recourt à deux méthodes de pression : la mobilisation de la population musulmane du Danemark, et le recours à des États musulmans ainsi qu’à leurs organisations internationales. Mais le premier procédé démontre très vite son insuffisance (il n’y aura qu’une seule manifestation, ratée), tandis qu’au bout de cinq mois, le second produit la crise internationale la plus grave que le Danemark ait subie depuis la Deuxième guerre mondiale : les représentants autoproclamés d’une minorité immigrée sont parvenus à enrôler dans leur cause d’importants représentants de l’islam mondial et, potentiellement, son milliard trois cents millions de fidèles.

La Critique est-elle laïque ? Non, bien sûr !

Donc, les auteurs de l’ouvrage américain de 2009 ont entrepris de répondre à la question de savoir si la « Critique » est ou non « laïque ». Le choix de cet adjectif par les traducteurs français semble venir d’une intention de radicaliser le propos des auteurs, ce qu’ils font de deux manières. D’une part, en attribuant une majuscule à « critique » afin de souligner le caractère vénérable de cette activité, destinée à déstabiliser les évidences et les certitudes, tout « ce qui va de soi ou qui paraît donné dans l’ordre des choses ». D’autre part, en optant pour le concept français de « laïcité », et en désignant ses partisans par le terme de « laïcistes » :
« Malgré les différences historiques considérables entre le monde anglo-saxon et la France, et donc entre secularism et laïcité, nous avons pensé que leurs points communs étaient plus nombreux et plus décisifs dans ce contexte : réduction du religieux à une croyance intime, neutralité supposée de l’État, dimension normative de cette neutralité, etc. »
Inutile d’objecter aux auteurs de La Critique est-elle laïque ? que leur définition est impropre et qu’elle repose, comme Catherine Kintzler ne se lasse pas de le répéter, sur une confusion entre le domaine de l’autorité publique (qui s’abstient en matière de croyance et d’incroyance) et celui de la société civile, libre d’afficher en public ses opinions, même religieuses. Car ces auteurs n’entendent nullement construire philosophiquement un concept de laïcité, mais proposer une généalogie à la Foucault (il y aurait une épistémè du secularism, concept politique permettant à « l’État libéral » de produire un certain type de sujet), dont Talal Asad a publié le résultat en 1993, et qui a rapidement fait école. Le principe de neutralité ne serait alors qu’une ruse de l’État moderne, qui assurerait favoriser le libre épanouissement des religions afin de mieux les reléguer dans le champ clos de l’intimité personnelle et donc les plier à ses normes.
Or cette proposition insoutenable – « l’État libéral » cantonnerait les religions dans le for intérieur des citoyens – permet aux auteurs d’en avancer une autre, qui paraît constituer la cible principale du volume : jamais l’État moderne n’a réellement procédé à une quelconque séparation avec la religion (il s’est contenté d’en absorber ceux des aspects qu’il ne pouvait pas anéantir) ; par ailleurs, il n’est pas souhaitable qu’une semblable séparation soit jamais imposée à ces nouveaux venus dans les démocraties euro-américaines que sont les musulmans.
Selon Wendy Brown, les participants au séminaire Is Critique Secular ? se sont rassemblés sur ce projet : depuis les Lumières et Marx, la critique de la religion a été un préréquisit de la pensée critique ; cent cinquante ans plus tard et dans un monde radicalement transformé, où en sommes-nous ? La réponse à cette question exige qu’on accepte de « mettre à l’épreuve le caractère supposément laïc de la Critique » – d’où la forme interrogative du titre. Toutefois, le propos oscille perpétuellement entre deux registres, celui de l’assertion dogmatique (non, la Critique n’est pas laïque, malgré le préjugé tenace qui « domine l’université occidentale dans son ensemble ») ; et celui de l’interrogation, qui paraît avoir été adopté pour sa vertu magique, car sa forme, par elle-même, effectuerait la « dispersion […], dissémination et désorientation » des idées reçues.

L’affaire des dessins vue par la Critique

Le séminaire de 2007 a jugé que la crise des dessins danois lui offrait une « occasion extraordinaire » pour apercevoir les conventions jusque-là inaperçues qui régissent les discours sur « la laïcité, la religion, l’insulte, l’offense, le blasphème, la liberté d’expression, la dissidence et la critique ». Les exposés de Talal Asad et Saba Mahmood ont alors joué un rôle central, puisqu’ « ils se concentraient sur l’affaire des caricatures danoises, c’est-à-dire sur les protestations et les débats autour de la publication en 2005, dans un journal danois, d’une série de dessins caricaturant le prophète Mahomet ».
Quatre commentaires sont ici nécessaires. En premier lieu, la traduction de l’ouvrage (comme c’est aussi le cas dans la presse française) parle de « caricatures » pour désigner douze dessins de presse dont quatre seulement satirisent le Prophète. Or le texte américain du livre parle de cartoons, un terme générique qui recouvre l’ensemble des dessins de presse humoristiques ; et l’on se souvient que la consigne du Jyllands-Posten – « Dessinez le Prophète comme vous le voyez » – laissait ouvertes toutes les possibilités, et que les artistes l’avaient comprise ainsi. En deuxième lieu, Wendy Brown n’indique ni les circonstances dans lesquelles le journal danois a entrepris cette expérience (vérifier l’existence, chez les artistes, d’une peur de dessiner Mahomet), ni le contexte éditorial de leur publication, le dossier sur l’apparition récente de ce sentiment de menace au Danemark et en Suède. En troisième lieu, cette affaire a certes suscité des « protestations » et des « débats », mais aussi une crise internationale majeure, et une épidémie de violences (avec de nombreux morts et blessés, ainsi que des destructions de bâtiments) que ses instigateurs ont eu le plus grand mal à éteindre. En quatrième lieu, entre la publication des dessins et la fin de la crise de très nombreux acteurs sont intervenus : il conviendrait de les identifier, et de préciser quelle fut leur action au jour le jour, car il aura fallu leurs efforts cumulés pour produire une « affaire ».
La Critique est-elle laïque ? prend donc son départ dans une version tronquée de la crise des dessins de Mahomet, en vue de justifier une critique cinglante de la laïcité, y compris sous la forme anglo-américaine du secularism : tous deux figureraient parmi les instruments que l’Occident libéral s’est forgés afin de soumettre les peuples de la planète à son hégémonie.

Talal Asad et la guerre de civilisations

Malgré ma fréquentation de l’œuvre de Talal Asad, j’ai quelque mal à comprendre selon quels principes de méthode il a constitué l’objet empirique dont traite sa contribution à ce volume, « Liberté d’expression, blasphème et critique laïque ». De toute évidence, il a en tête une formation idéologique, la « civilisation occidentale » et son antagonisme obsessionnel avec « la civilisation islamique ». C’est le thème principal de son travail depuis les années 90, mais cette fois, Asad a pris comme angle d’attaque un aspect particulier de la crise des dessins de Mahomet, les idées véhiculées par les Euro-Américains au cours de l’abondant débat public auquel elle a donné lieu.
Pourtant, plutôt que de les exposer et de les mettre en rapport avec les événements que ces polémiques commentaient, Asad les fourre dans une ample besace censée contenir l’idéologie de l’Occident : des slogans de politiciens néoconservateurs américains en 2001 (la « guerre au terrorisme » islamique), la pensée de Francis Fukuyama (l’annonce, en 1992, de la victoire idéologique du libéralisme), le discours du pape Benoît XVI à Ratisbonne (qui, quelques mois après la fin de la crise danoise, se serait emparé de la raison grecque pour en doter le christianisme et combattre un islam qui convertirait par l’épée), les thèses de Marcel Gauchet sur le christianisme comme religion de la sortie de la religion (1985), des discours xénophobes de politiciens danois sur l’immigration musulmane, une phrase tirée de l’Évangile selon Saint-Jean (« seule la vérité libère » même si elle blesse, fondement supposé de l’injonction à froisser les convictions d’autrui), etc.
Or si l’on prend la peine d’examiner d’un peu près la crise danoise, elle ne montre guère à l’œuvre un Occident chrétien unanime, mobilisé dans une action de masse contre « l’islam ». Ainsi : en 2005-2006, la classe politique et la presse danoises ont été très partagées sur la publication des dessins comme sur les moyens de sortir de la crise ; la population non musulmane n’a pas suivi les idéologues des partis ou des médias, car elle a établi une distinction nette entre l’action des imams salafistes du Comité de défense du Prophète et l’opinion des musulmans vivant au Danemark, reconnaissant d’ailleurs à tous le droit à la liberté d’expression ; toutes les institutions religieuses du pays ont désapprouvé la parution des dessins de Mahomet, etc. Bref, à part l’extrême-droite, dont un parti participait à la majorité gouvernementale sans avoir d’impact direct sur la solution de la crise, la nation danoise ne s’est nullement constituée en « civilisation occidentale », sûre de son hégémonie, et acharnée à punir la « civilisation islamique » d’avoir menacé la liberté d’expression. Au demeurant, l’énorme majorité des musulmans vivant au Danemark a refusé de se solidariser avec les imams du Comité, et même de manifester contre les dessins – bien que, évidemment, elle ne les ait pas applaudis.
De même, Talal Asad a beau enrôler Benoît XVI dans son idée fixe – l’Occident, la démocratie, la notion de la vérité qui libère, etc., seraient issus du christianisme, lequel est en guerre avec l’islam -, le pape n’en a pas moins condamné la publication des dessins danois, comme l’ont fait d’ailleurs toutes les religions organisées : il y a un bon demi-siècle qu’en matière de « blasphème », elles font cause commune contre ceux qu’elles appellent les « laïcistes ». Enfin, la plupart des dirigeants des États occidentaux (à l’exception d’Angela Merkel) et des grandes organisations internationales ont condamné la publication des dessins, et fait l’impossible pour calmer le conflit. C’est même la raison pour laquelle, en février 2006, la presse européenne a diffusé les dessins du Jyllands-Posten : elle estimait la liberté d’expression menacée par la démission des dirigeants euro-américains autant que par les porte-paroles de l’islam à travers la planète.
Pour sa part, Talal Asad n’estime pas que la liberté d’expression ait été à aucun moment été menacée dans cette affaire. Certes, « la communauté musulmane » a « réagi » à la publication des « caricatures » du Jyllands-Posten, mais c’est la réaction euro-américaine à la réaction musulmane qui pose question à l’anthropologue : pourquoi « la société laïque libérale » ne tolère-t-elle pas qu’on soulève publiquement une objection religieuse ? Du fait qu’il se cantonne à l’analyse des discours « occidentaux-chrétiens », Asad omet de signaler que les objections des imams indignés se sont situées dans le cadre normal du débat public – celui de la société civile – tant que leurs auteurs se bornaient à protester et à organiser des manifestations. Ils étaient en effet parfaitement fondés à s’élever contre la publication de dessins du Prophète, et bien sûr à invoquer leur sensibilité religieuse blessée par la publication des quatre caricatures. Pour qu’une affaire proprement politique puisse naître, il a fallu des actions d’une toute autre nature : que ces imams contactent l’ambassadrice d’Égypte à Copenhague, que celle-ci mobilise ses collègues de pays musulmans en poste au Danemark, que des courriers diplomatiques soient échangés avec le Premier ministre danois, que le Comité Européen de défense du Prophète effectue un voyage au Moyen-Orient, etc. Cette discrète activité internationale des imams ne fut connue de la presse danoise que deux semaines après leur retour : le scandale fut tel que le Comité européen de défense du Prophète déclara une paix unilatérale au gouvernement, et qu’ils se tint désormais soigneusement à l’écart de l’affaire qu’il avait suscitée.
Aussi n’ai-je pas réussi à comprendre sur quoi Talal Asad se fonde quand il prétend s’appuyer sur le cas de l’affaire danoise pour propulser la Critique au-delà de la laïcité.

Les passions morales et leurs effets

Dans un paragraphe de sa communication intitulé « Comment les Musulmans pensent-ils la liberté d’expression ? », Talal Asad nous dit qu’en islam, la croyance n’est pas conçue comme un ensemble d’idées, de propositions auxquelles on adhérerait parce qu’on les tiendrait pour vraies (« croire que… »), mais comme un engagement que le fidèle prendrait envers Dieu devant sa communauté (« croire à… », « avoir foi en… »). Dans son for intérieur, le musulman peut penser ce qu’il veut, y compris que Dieu est une crapule ou un non-être : tant qu’il garde son opinion pour lui, il demeure en accord avec les prescriptions de l’islam. Par contre, toute communication hétérodoxe, même en privé à ses proches et a fortiori dans la société civile ou dans l’espace public, doit être sanctionnée, parce qu’elle est assimilée à une tentative de séduction d’autrui : elle « travaille à le rendre infidèle, à lui faire rompre un engagement social existant », et de ce fait, elle met en danger « l’ordre social », « la communauté ». Malgré les manœuvres rhétoriques d’Asad, qui exalte à plusieurs reprises le respect de la tradition islamique pour la liberté intérieure (car le forçage des consciences, normal dans le christianisme, y est prohibé), et la conception sophistiquée qu’elle se fait de la séduction, le message de l’islam est clair : il reconnaît absolument la liberté de croyance, mais il interdit absolument la liberté d’expression – dès lors, la question de savoir comment il « pense » celle-ci paraît secondaire.
L’auteur noircit plusieurs pages dans l’intention de nous faire saisir la logique de la condamnation pour apostasie qui frappa en 1995 le professeur égyptien Nasr Hamid Abu Zayd, car il avait enseigné l’herméneutique du Coran (plusieurs années après Mohammed Arkoun en France). Selon Asad, Abu Zayd a enfreint les règles de « l’engagement islamique », il est donc normal qu’il soit condamné à subir les « conséquences sociales » de sa conduite : renvoi de l’université, dissolution de son mariage… (l’auteur ne signale ni que les plaignants étaient des salafistes, ni que le professeur Abu Zayd dut s’enfuir avec son épouse pour demeurer marié et survivre). Ces pages, dont la logique échappe à la première lecture, ont en réalité pour objectif de faire comprendre à la fois pourquoi il est urgent de rompre avec une conception laïque de la religion, et quelle notion en avaient les musulmans du Moyen-Orient et d’Asie qui ont protesté avec violence contre les « caricatures » de Mahomet en 2005-2006.
Selon Asad, puisque la foi islamique n’a pas de contenu propositionnel (elle ne dit pas ce qu’il faut croire) et qu’elle est un « engagement » de toute la personne envers Dieu-et-la-communauté (il faut avoir foi en ce monolithe), les Occidentaux devraient cesser d’être surpris par la « violence irrationnelle des musulmans face à la publication des caricatures ». Comment le fidèle pourrait-il « garder le silence » devant un blasphème dont la présence menace « cette relation vivante » ? il exprime ses croyances parce qu’il « doit le faire ». Les modernes héritiers du christianisme ont été habitués par le processus de sécularisation à donner des contenus propositionnels à leurs idées sur Dieu, à particulariser leurs liens (avec Dieu, avec la société, avec le prochain), à pratiquer le détachement envers les « engagements », et à refuser tous les tabous : il est temps qu’ils admettent qu’ils ont désormais parmi eux des gens susceptibles d’agir, éventuellement avec violence, en vertu de « passions morales », au nom d’une « religion politique ». (Asad ne signale pas qu’ils sont aidés en cela par le poids géopolitique des États dans lesquels l’islam est majoritaire, et par le fait que l’islam est la seule religion au monde à disposer d’une organisation internationale reconnue, l’Organisation de la Conférence islamique. Celle-ci a proclamé en 1990 une Déclaration des droits de l’homme en islam, placés sous l’autorité de la Ummah et de lacharia ; la liberté de religion en est exclue, et la liberté d’expression soumise à des limitations drastiques.)

L’islam dévot et la sémiotique de l’image

Saba Mahmood est connue du public français pour l’enquête qu’elle a effectuée au Caire, de 1995 à 1997,Politique de la piété. Le féminisme à l’épreuve du renouveau islamique. Arrivée en Égypte féministe laïque, elle semble y avoir eu la révélation de ce que peut un mouvement religieux, surtout quand il concerne des femmes qui s’inculquent mutuellement les pratiques de piété et l’intériorisation des vertus islamiques. La plus importante d’entre elles est la modestie, dont Mahmood nous détaille l’apprentissage, mais en insistant sur l’extraordinaire autonomie (la fameuse agency) que, paradoxalement, ces femmes conquièrent grâce leur passage par le « mouvement des mosquées ». Problème : cette ethnographie si minutieuse ne fait aucune référence à l’organisation du mouvement, à son histoire, à sa relation avec un quelconque courant religieux ou politique, ni, enfin, à une quelconque autorité masculine. L’anthropologue américaine paraît du moins avoir découvert à cette occasion qu’une religion est plus qu’une doctrine, un ensemble d’idées sur les êtres naturels et surnaturels, plus même qu’un ensemble de textes sacrés, des rites et des règles de conduite : c’est avant tout une réunion de communautés vivantes qui font circuler des valeurs spirituelles entre l’espace collectif (« public ») et le for intérieur de ses membres.
Dans La Critique est-elle laïque ?, la communication de Saba Mahmood porte sur « l’affrontement » implacable entre deux « visions du monde », « laïque » et « religieuse », que l’affaire des dessins de Mahomet aurait dévoilé avec un singulier éclat. À l’instar de ses collègues, l’anthropologue affirme que « l’État laïc », tout en se prétendant neutre en matière de convictions ultimes, promulgue des lois qui contraignent les religions de multiples manières, et qui en réduisent le domaine d’exercice au « privé », le for intérieur des individus. Or, quand ils travaillent sur le terrain, les anthropologues ne rencontreraient jamais des individus (ces fictions juridiques, dont la loi dit qu’ils opèrent librement leurs choix entre les « doctrines » auxquelles ils sont susceptibles d’adhérer), mais seulement des personnes, des êtres complexes, engendrés par une communauté qu’ils n’ont pas choisie et qui fait d’eux ce qu’ils sont, y compris en matière religieuse.
À travers le monde, les musulmans hostiles à la publication des dessins danois y ont réagi soit par des protestations verbales, soit par des violences. Parmi ces conduites, Saba Mahmood élimine les violences et les plaintes relatives à la commission d’un blasphème par les artistes : non pas qu’elle les dénie, mais parce qu’elle les juge inappropriées. Elle voudrait en effet mettre sa compétence professionnelle au service de la cohabitation pacifique de tous dans des sociétés euro-américaines désormais multiculturelles. Aussi, se pose-t-elle cette unique question sur les événements de 2005-2006 : pourquoi les partisans de la « vision laïque du monde » ont-ils été incapables de comprendre l’offense subie par les musulmans, le fait qu’ils aient ressenti une atteinte portée à l’image du Prophète comme si elle avait visé leur personne propre ? Plus précisément : pourquoi les non-musulmans ont-ils été incapables de voir que les « caricatures » n’étaient pas pour les fidèles de l’islam de simples « représentations », car la personne de Mahomet est pour eux une « figure d’exemplarité » avec laquelle ils ont « une relation plus proche de l’assimilation et de l’incorporation que de la représentation » ?
Son analyse porte donc exclusivement sur une fraction des fidèles de l’islam, qu’on pourrait désigner par le terme de dévots, afin de souligner leur engagement dans des pratiques d’adoration les conduisant à se souder à la personne du Prophète. Or même une « laïciste » dans mon genre peut parfaitement comprendre qu’ils aient ressenti une « blessure morale » devant des caricatures du Prophète (quatre dessins sur les douze qu’a publiés le Jyllands-Posten), et qu’ils se soient sentis atteints au plus profond d’eux-mêmes. Pourquoi Mahmood s’imagine-t-elle que j’ai l’esprit bouché par « la sémiotique classique de l’image » (qui semble avoir été promulguée avec les lois de laïcité), et que je ferais mieux de l’échanger avec une autre, qui fait des images des êtres dotés d’agencéité ? Il se trouve que je lis depuis quinze ans les publications relatives à cette théorie de « l’acte d’image », qui tente de démontrer que les images ont un effet par elles-mêmes sur leurs spectateurs, indépendamment des dispositions intérieures de ceux-ci et des intentions de l’artiste. Selon Mahmood, cette théorie permettrait d’avancer « que les images sont des êtres animés, vivants, sensibles, renfermant des sentiments, des intentions et des désirs, et qu’elles exercent une action sur le monde qui ne tient pas à la seule interprétation » du spectateur ; car « elles créent une forme de relation au spectateur, elles apportent une transformation sociale, elles agissent sur le réel ». L’anthropologue conclut triomphalement : « Voilà pourquoi […] certaines images sont ‘offensantes ' ». Voilà pourquoi votre fille est muette.
S’il se vérifiait toutefois que les images, dès l’instant de leur publication, échappent à ce point à leurs créateurs, je ne vois pas quelle politique serait concevable, sinon une interdiction universelle des images, au titre du principe de précaution — qu’il s’agisse de dessiner des Prophètes, des bambins ou des voitures. Comme cela ne semble pas être la voie vers laquelle l’humanité se dirige, j’aimerais au moins que Mahmood explicite ce qu’aurait dû faire la rédaction du Jyllands-Posten le 30 septembre 2005 : puisque des chrétiens n’ont pas à se soumettre aux interdits d’autres religions, les artistes étaient donc en droit de représenter le Prophète ; mais concrètement, comment auraient-ils dû le faire, puisque fatalement leur création devait leur échapper ? Déjà, les auteurs de La Critique est-elle laïque ?, sans pourtant avoir donné à penser qu’ils étaient eux-mêmes des dévots, ont vu des caricatures dans tous les dessins. L’on peut craindre dès lors que les artistes danois auraient eu beau faire, dès lors qu’ils produisaient une image du Prophète, elle aurait fatalement « bouleversé la relation affective », ou « violé l’intimité » que les « musulmans pieux et orthodoxes » entretiennent avec leur « figure d’exemplarité »Ergo, seuls les musulmans sont fondés à le dessiner. Mais justement, c’est interdit. Au secours.
La Critique non laïque est-elle une activité sensée ?

Notes

1 – La Critique est-elle laïque ? Blasphème, offense et liberté d’expression, par Talal Asad, Wendy Brown, Judith Butler et Saba Mahmood (2015), traduit par Francie Crebs et Franck Lemonde, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, 182 pp.
2 – Dans Comment produire une crise mondiale avec douze petits dessins (voir les références à la note 4). Jeanne Favret-Saada est anthropologue ; ancienne directrice d’études à l’École pratique des hautes études, elle a publié de nombreux ouvrages. On trouvera une bibliographie et des textes en ligne sur le site de l’École des hautes études en sciences sociales qui a consacré une journée d’étude à ses travaux en 2012 http://gspm.ehess.fr/document.php?id=1408
3 – Berkeley, Townsend Center for the Humanities, 154 p.
4 – Paris, 2007, Les prairies ordinaires. Je l’ai republié l’an dernier chez Fayard, augmenté de données et des réflexions sur les affaires Rushdie en 1989 et Charlie-Hebdo/l’Hyper-Cacher en janvier 2015. Mon travail se fonde sur une enquête effectuée au Danemark, et sur la consultation de la presse des pays concernés.
5 – Talal Asad estime « trop facile » mais sans dire pourquoi l’idée d’une « peur paralysante de critiquer les musulmans » chez les artistes (op. cit. p. 74).
6 – Favret-Saada, op. cit., pp. 81-86.
7 – La Critique majuscule, ce sera l' »examen raisonné et systématique », et non le criticism, banal jugement de valeur, souvent défavorable (id. pp 19-20). Wendy Brown en parle aussi comme de « la Critique politique, sociale, et culturelle » (ibid. p. 22).
8 – « Note sur la traduction », ibid. pp. 19 et 20. Les traducteurs ne commentent pas le fait qu’en parlant de « laïcistes », ils emploient le même terme que les dévots du christianisme, selon qui les laïques manquent par définition de modération.
9 – 1993, Formations of the Secular. Christianity, Islam, Modernity, StanfordStanford University Press. 2006 ; David Scott & Charles Hirschkind, eds. Powers of the Secular Modern : Talal Asad and his Interlocutors, Stanford, Stanford University Press.
10 – Wendy Brown, Introduction, ibid. pp. 21 et 22. Ou encore : « La Critique est-elle ou doit-elle être laïque en elle-même ? La laïcité est-elle un préréquisit de la Critique ? » (ibid. p. 33).
11 – Les amateurs de novlangue déconstructiviste trouveront p. 22 une vingtaine de lignes savoureuses.
12 – Wendy Brown, ibid. p. 21.
13 – Malgré sa maladresse, le discours de Benoît XVI semble plutôt avoir voulu réunir la Chrétienté et l’Islam sous le patronage du logos – en engageant il est vrai l’islam à entrer dans le conflit des interprétations de la tradition. Cf. Jean Bollack, Christian Jambet, Abdelwahab Meddeb (2007), La conférence de Ratisbonne : enjeux et controverses, Paris, Bayard Presse.
14 – De jeunes sociologues danois ont effectué une inventive enquête d’opinion au plus fort de la crise : Sniderman, Paul M., Petersen, Michael Bang, Slothuus, Ruth, Stubager, Rune (2014), Paradoxes of Liberal Democracy. Islam, Western Europe, and the Danish Cartoon Crisis, Princeton, Princeton University Press.
15 – Peu avant le 30 septembre 2005, l’un d’entre eux, Ahmed Abu Laban, téléphona au rédacteur en chef du Jyllands-Posten pour le convaincre de ne pas enfreindre l’interdit religieux de l’islam : cette démarche n’était que déplacée. Elle eut pour effet de confirmer le journal dans le bien-fondé de son projet.
16 – Talal Asad évoque de façon oblique Edward Saïd, l’auteur de Orientalisme (1978, Londres, Routledge and Kegan Paul), sans préciser que celui-ci a été foncièrement libéral, démocrate, et laïque, qu’il dénonçait sans ambages ce qu’il ne craignait pas d’appeler « le fondamentalisme musulman » (notamment dans le mouvement Palestinien), et qu’il a exhorté les intellectuels du Moyen-Orient à prendre publiquement la défense de Salman Rushdie (« Contre les orthodoxies », dans Pour Rushdie, Cent intellectuels arabes et musulmans pour la liberté d’expression, Paris, 1993, La Découverte, pp. 257-258).
17 – Il se trouve que j’ai étudié ce cas, et que j’ai lu la même bibliographie en anglais et en français que Talal Asad. Il ne dit pas qu’au cours des années 1990, des activistes salafistes ont investi les institutions judiciaires égyptiennes, les contraignant à appliquer la charia contre quelques esprits libres ; et que des attentats ont été commis contre des journalistes et des écrivains : c’est à cette époque que Naguib Mahfouz a été attaqué au couteau, que Farag Foda a été assassiné, etc.
18 – Ibid. p. 35, n. 2.
19 – Traduction N. Marzouki, Paris, La Découverte, 2009. Saba Mahmood enseigne l’anthropologie sociale et culturelle à l’université de Berkeley.
20 – J’avoue n’avoir pas saisi la pertinence du chiasme qu’elle introduit dans son titre, « Raison religieuse et affect laïque : un clivage incommensurable ? » – bien que j’aie scruté le texte avec attention, ainsi que trois interviews que Mahmood a données à Paris (Mediapart, 25 décembre 2015, Le Monde, 8 janvier 2016, et Libération, 18 janvier 2016).
21 – Encore la méprise (décidément increvable) sur les domaines respectifs du « privé » et du « public » en régime laïque. Selon Mahmood (Mediapart), l’Etat laïque « désarticule » le lien « entre le ressenti intérieur et la manifestation extérieure, entre l’intimité de la foi et l’expression publique de celle-ci ».
22 – Extraits de son interview à Mediapart.
23 – Le Monde. Comme lectrice des travaux sur « l’acte d’image », je signale qu’ils n’osent pas souvent des affirmations aussi naïvement animistes que celles-ci.
24 – Extraits des interviews de Mahmood à Libération et Le Monde.
© Jeanne Favret-Saada et Mezetulle, 2016.

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